Les règles du jeu : 10 minutes pour construire des conditions de travail

Les règles du jeu permettent de construire avec le groupe un cadre propice au travail collaboratif

À EPIGO, nous démarrons de manière systématique les ateliers que nous facilitons par des règles du jeu. De même, lorsque nous formons des facilitateurs, nous insistons sur l’importance et la puissance de cet outil. Pour un regard profane, cela peut sembler un peu artificiel, ou chronophage, surtout quand on intervient dans un contexte tendu, avec de la pression sur le résultat. Mais les règles du jeu sont un investissement toujours utile dans le fonctionnement collectif. Nous partageons ici notre position sur le sujet, ainsi qu’une méthode pour les proposer au groupe.

Les règles du jeu : des conditions à construire pour travailler en groupe

Nous considérons que le rôle d’un facilitateur est de permettre le travail coopératif d’un groupe, en fournissant des conditions spécifiques de travail permettant les échanges, la créativité, la sécurité psychologique.

Il s’agit de s’intéresser au niveau qui dicte COMMENT on fonctionne et on réfléchit ensemble.

Ce niveau est en interaction avec celui des échanges (du QUOI) mais il est souvent inconscient, dicté par des normes et des a priori culturels. On a tendance à considérer qu’il est évident. Voire, cela peut paraître désagréable de s’y intéresser. Comme toutes les normes sociales et culturelles, il cherche à vivre caché…

Et pourtant, intervenir sur ce niveau est une nécessité. C’est une des conditions du succès des équipes et la raison d’être du facilitateur.

Une des façons les plus simples pour un facilitateur d’intervenir sur le niveau du COMMENT, c’est de verbaliser ce qui s’y passe.

Remarquez comment le fait d’exprimer « il y a de la tension dans l’air » fait baisser la tension.

Pastiche en miniature de la déclaration d’une constitution, les règles du jeu sont donc une façon de construire, avec le groupe, des conditions de travail collectif productives et agréables. Elles sont souvent l’acte fondateur du facilitateur, qui se positionne ainsi au service du groupe, sur la question du COMMENT.

Construire des règles du jeu

Infos pratiques

  • Contexte : en début d’atelier
  • Temps : 5 à 30 minutes — selon la taille du groupe et le format
  • Qui : le groupe
  • Matériel : paper board, du scotch de peintre pour afficher les règles


Version longue : co-construire les règles du jeu avec le groupe

Si vous vous apprêtez à travailler pour une longue séquence (plus d’une journée) ou sur un sujet qui a à voir avec la coopération ou le collectif, il est intéressant de co-construire totalement avec le groupe les règles du jeu de l’atelier.

Pour cela, commencez par poser la question : « Rappelez-vous la dernière fois qu’une réunion ou un atelier a été très productif et agréable. Quels étaient les facteurs qui ont permis ça ? » et notez à la volée les idées produites par le groupe (« on avait du temps », « les gens étaient sympa », « personne n’a regardé son téléphone » …). Puis, parmi les idées notées, posez la question : « quelles sont les conditions que l’on peut contrôler ou édicter ? ». Ce sont celles-ci qui vont donner ensuite les règles du jeu.

Ensuite, rédigez au propre les règles du jeu et demandez l’assentiment de chaque personne. Puis affichez les au mur.


Version courte : proposer des règles du jeu

Proposez au groupe des règles du jeu, en précisant que celles-ci ont vocation à s’appliquer uniquement durant l’atelier.

Puis demandez l’accord de chacun des participants. Si vous souhaitez être sûr d’embarquer tout le monde, vous pouvez accrocher le regard de chaque participant en leur demandant s’ils sont ok.

Exemples de règles du jeu

Voici une liste de certaines des règles que nous utilisons. A vous de sélectionner et d’utiliser, avec votre groupe, celles qui conviendrait le mieux. Pour chaque principe, l’incarner par un exemple concret :

  • Bienveillance : on prend en compte les émotions des participants et on veille à les respecter
  • A priori positif : on cherche ce qui est intéressant, constructif et non ce qui cloche (pour gagner du temps !)
  • Écoute : on écoute jusqu’au bout et on ne monopolise pas la parole
  • Droit à l’erreur : on teste, on essaye, on se donne le droit de se planter
  • Droit de changer d’avis : on ne peut reprocher aux participants de dire une chose, puis son contraire
  • Attention : on met les téléphones sur silencieux, on les garde dans la poche
  • Confidentialité : on peut échanger sur ce qui a été dit, mais pas sur qui a dit quoi
  • Bonne humeur : dans les échanges, juste pour le plaisir !


Vous pouvez aussi fonder vos règles du jeu sur les Accords Toltèque par exemple (voir cet exemple de nos confrères du WorkLab).

Les bénéfices

Se mettre d’accord sur des règles du jeu permet donc de générer un premier accord au sein du groupe et de mettre en place des conditions permettant le travail collectif. Cela a aussi comme avantage :

  • De créer un espace de liberté partagée : quand les règles sont posées on peut s’y référer quelle que soit sa position et son rôle dans le groupe

  • De permettre au groupe de s’auto-réguler. Il nous arrive fréquemment que ça soit le groupe qui fasse mention des règles du jeu pour modérer un comportement (d’où l’importance de les afficher physiquement dans la pièce

  • De constituer le groupe, qui vit une première expérience et créé un premier consensus

  • De vous positionner en tant que facilitateur, au service du groupe, en produisant le cadre

  • De faire prendre conscience du niveau du COMMENT (de l’existence de conditions pesant sur les rapports sociaux) et de certaines bonnes pratiques ;

  • À terme, dans une organisation, de faire prendre conscience de la capacité à influer les conditions du travail en commun et de permettre ainsi aux équipes d’intervenir sur la culture partagée pour favoriser la collaboration.