Cet article fait partie d’une série de 4 posts décrivant 4 approches de la culture d’entreprise.
Culture d’entreprise : 1) « une façon partagée de faire les choses », qui peut être formalisée à travers un certain nombre de « choses qui ne devraient jamais changer »
Le sujet de la culture d’entreprise est considéré comme fondamental par de nombreuses entreprises, particulièrement au sein de ces nouveaux acteurs que sont les grandes entreprises du numérique. Deux interviews vidéo de CEO viennent illustrer ce phénomène :
- Dans une courte vidéo, Tony Hsieh, CEO de Zappo’s présente sa vision du sujet
- Au sein de son intervention dans un cours à Stanford, Brian Chesky, un des fondateurs et le CEO d’AirBnB décrit notamment sa politique concernant la culture d’entreprise (jusqu’à 51min45sec)
Convaincus de l’importance de la culture dans le succès de l’entreprise, ils incarnent une approche volontariste de la question. La culture est la priorité numéro 1 de l’entreprise pour Tony Hsieh, le CEO précurseur sur le sujet. Inspiré par Hsieh, le choix de Brian Chesky chez AirBnB a été de construire explicitement une culture forte, marquée, qui soit un produit de la vision et de la personnalité des fondateurs.
Hsieh et Chesky partagent la conviction qu’il faut contrôler la culture de l’entreprise. Ce contrôle s’exerce via 3 biais :
1. Les embauches : le premier « filtre »
Hsieh et Chesky prônent tous les deux des entretiens spécifiques pour tester la « compatibilité » des candidats avec la culture de l’entreprise et ses « valeurs ». Il est par exemple nécessaire d’avoir « l’accueil dans son ADN » pour pouvoir travailler chez AirBnB. Le « fit » culturel est présenté comme une condition nécessaire pour être recruté.
Ces entretiens sont menés par les RH ou, chez AirBnB par des employés ayant été au contact de Chesky et ayant ainsi absorbé ses critères de recrutement, quand il lui est devenu trop compliqué d’interviewer chaque candidat.
2. Le licenciement : « sortir » les gens incompatibles
Une personne n’adhérant pas aux valeurs, ou ayant un comportement dommageable pour la culture de l’entreprise doit être licenciée. Cela, même si elle est compétente dans son job et rempli ses missions.
3. La communication : répéter continuellement un certain nombre de messages clés
Chesky prône la répétition extrêmement fréquente d’un nombre limité de mantras, de points clés, qui sont des invariants de la culture de l’entreprise. Ainsi, chaque fois d’un employé d’AirBnB passe une porte du siège, au moment de badger apparaitra le mantra « Champion is the mission », écrit sur au dos du badge. Ils reçoivent de plus un email envoyé par Chesky tous les dimanches soir, les entretenant de la vie de l’entreprise.
Nous le voyons, cette posture est celle du chef qui sait ce que doit être la culture de l’organisation et donc impose à l’entreprise des façons de faire. Cette posture pose quelques problèmes :
- Peut-on imaginer des cultures fortes, des identités marquées, qui ne soient pas l’émanation d’un ou deux hommes ?
- À quel point peut-on demander à un salarié une adhésion à une culture, à des choses aussi intangibles qu’un rapport au monde, des croyances, des convictions ? N’est-ce pas une évolution majeure du contrat tacite employeur / employé ?
- Cette volonté de contrôle n’est-elle pas illusoire (la culture étant faite de croyances profondes et inconscientes) ? Et problématique en cas d’évolution de l’environnement (le contrôle s’opposant à la plasticité) ?
Notre première définition de la culture et l’approche très volontariste de ces 2 CEO vont maintenant être remise en cause dans notre article suivant, décrivant le point de vue de l’analyste.