Lean startup et grands groupe ép. 4 : 3 clés d’une expérimentation réussie

Lean startup et grands groupes, résumé des épisodes précédents :

  • Le lean startup arrive dans les grands groupes — épisode 1
  • Sa mise en place présente un certain nombre de bénéfices directs — épisode 2
  • Mais cela représente aussi une transformation culturelle, complexe à gérer — épisode 3

Pour ce quatrième et dernier épisode, nous proposons d’aborder quelques clés pratiques pour conduire une expérimentation réussie !

Implémenter la méthode lean startup dans un grand groupe vient, de fait, bousculer la culture de la sécurité. Il importe donc d’accompagner cette évolution culturelle et de ne pas minimiser la part de conflit latent qu’elle comporte. Toute transformation des manières de faire, aussi nécessaire qu’elle soit, passe par un moment de friction forte entre les croyances établies et les nouvelles croyances à acquérir.

Voici 3 clés de succès — expérimentées avec nos clients — pour une transformation réussie.

1. La transition vers la méthode lean se fait… en mode lean !

Dans le cadre du plan de transformation d’un grand groupe français, nous avons formé et accompagné des facilitateurs, ambassadeurs de la méthode « Lean startup », chargés de porter des projets transverses, en commençant par se centrer sur leurs besoins (tours de table, retours d’expérience). C’est ce qui a permis de générer la conviction nécessaire au travail d’évangélisation de la méthode en interne et d’adapter notre accompagnement à leurs préoccupations réelles.

Première clé de la transition culturelle : qu’elle soit modélisante :

  • Commencer par une expérimentation locale (une équipe sur un projet spécifique) : cela permet d’identifier les principales difficultés à moindre coût et de générer de la conviction par contagion.

  • Partir du besoin de l’équipe considérée : de la même manière que l’approche lean startup promeut le fait de se centrer sur le client, il importe de partir de la situation de l’équipe (quelles ont été les raisons de leurs réussites et échecs passé) avant de leur présenter l’approche lean.


2. La transition vers la méthode lean implique de protéger ceux qui la portent

Nous avons, dans ce même groupe, mis en place des ateliers réguliers de débriefing et de coaching, ainsi qu’une série de supports théoriques et pratiques. Cela a permis aux ambassadeurs, très exposés, de pouvoir renforcer leurs acquis et partager les bonnes pratiques. À la clé : une cohésion de ces ambassadeurs et le développement de nouvelles façons de faire, ancrée dans l’expérience et intellectualisées.

Deuxième clé de la transition culturelle : protéger les équipes en phase d’expérimentation :

  • Entendre les objections : « ça ne va pas passer chez nous », « on risque d’abîmer l’image de l’entreprise », « les clients et les managers exigent des produits parfaits »… Les objections non formulées en amont seront celles qui empêcheront la mise en œuvre de la méthode.

  • Protéger la démarche : dans le cadre d’un pacte, faire en sorte que l’équipe portant la nouvelle méthode bénéficie d’un « permis d’échouer » délivré par la direction, qui leur permettra de sortir de leurs réflexes habituels et de tester pleinement leur nouvelle posture.

  • Accompagner les gens : opérer des retours d’expérience régulier, des débriefings sur la démarche, des échanges avec l’extérieur, afin de nourrir, soutenir, encourager l’équipe.


3. La transition vers la méthode lean startup passe par un nouveau langage commun

Nous avons, au sein du groupe accompagné, privilégié le travail avec le Value Proposition Canvas, et développé un vocabulaire commun, entre clins d’œil et termes techniques. Ces deux artefacts se sont retrouvés tout au long des ateliers et ont commencés à essaimer en dehors. Cela a permis une diffusion de la culture lean au-delà du groupe considéré.

Troisième clé de cette transition culturelle : développer de nouveaux artefacts, manifestations de la culture qui se met en place. Il s’agit de symboles (le babyfoot symbolise par exemple la culture startup) ou d’un nouveau langage commun (parler de MVP, de Value Proposition symbolise aussi la culture startup). Les artefacts sont la couche émergée de l’iceberg culturel (voir notre article sur la culture comme ce qui empêche le changement).

  • Développer un lexique partagé : être précis lors de l’utilisation des termes liés au lean startup, on passe vite de termes utiles à une novlangue fouillie ! Produire et utiliser collectivement des métaphores permet aussi de créer du sens et de l’appartenance (ex. le skateboard du MVP)

  • Choisir et utiliser un outil de design : il existe de nombreux outils permettant de travailler à plusieurs sur les différentes étapes du lean. En choisir un ou deux et les utiliser largement contribue à diffuser du sens et les pratiques. Exemples : le Business Model Canvas ou le Value Proposition Canvas d’Osterwalder.


S’accorder sur le rythme “émotionnel” qui permet d’intégrer le changement

Toute nouvelle méthode représente une menace pour l’ordre établi et la culture en place. L’organisation a tendance à réagir comme face à un corps étranger : elle cherche à éradiquer la source du désordre. La seule façon de garantir un changement durable dans l’entreprise, c’est d’aborder pleinement les impacts humains et émotionnels du changement : générer de l’adhésion, expérimenter des postures, entendre les peurs. Et cela prend du temps !

Mais une première expérience réussie avec des salariés convaincus est le facteur le plus puissant de transformation de la culture d’entreprise par contagion. À la clé, pour l’entreprise : une nouvelle capacité à s’adapter et à intégrer les méthodes porteuses des succès futurs.

Article précédemment publié sur LinkedIn le 15 avril 2017.